Entre science-fiction, récit post-apocalyptique et/ou roman spéculatif, L'Antre déroule son intrigue dans un futur indéterminé. Mais le travail d'Evenson se joue des attendus de la SF.
« Ici, on a tous du sang indien et quand ce n'est pas dans les veines, c'est sur les mains ».
Le 11 juin 1981, trois cents policiers de la sûreté du Québec débarquent sur la réserve de Restigouche pour s'emparer des filets des Indiens mig'maq. Emeutes, répression et crise d'ampleur : le pays découvre son angle mort.
Une adolescente en révolte disparaît, un agent de la faune démissionne, un vieil Indien sort du bois et une jeune enseignante française découvre l'immensité d'un territoire et toutes ses contradictions. Comme le saumon devenu taqawan remonte la rivière vers son origine, il faut aller à la source...
Histoire de luttes et de pêche, d'amour tout autant que de meurtres et de rêves brisés, Taqawan se nourrit de légendes comme de réalités, du passé et du présent, celui notamment d'un peuple millénaire bafoué dans ses droits.
Baptiste sait l'art subtil de l'imitation. Il contrefait à la perfection certaines voix, en restitue l'âme, ressuscite celles qui se sont tues. Mais voilà, cela ne paie guère. Maigrement appointé par un théâtre associatif, il gâche son talent pour un quarteron de spectateurs distraits. Jusqu'au jour où l'aborde un homme assoiffé de silence.
Pas n'importe quel homme. Jean Chozène. Un romancier célèbre et discret, mais assiégé par les importuns, les solliciteurs, les mondains, les fâcheux. Chozène a besoin de calme et de temps pour achever son texte le plus ambitieux, le plus intime. Aussi propose-t-il à Baptiste de devenir sa voix au téléphone. Pour ce faire, il lui confie sa vie, se défausse enfin de ses misérables secrets, se libère du réel pour se perdre à loisir dans l'écriture.
C'est ainsi que Baptiste devient son répondeur. A leurs risques et périls.
Ils commencent par là. Par la suspension. Ils mettent, pour la toute première fois, les deux pieds dans l'océan. Ils s'y glissent. A des milliers de kilomètres de toute plage. A bord d'un cargo de marchandises qui traverse l'Atlantique, l'équipage décide un jour, d'un commun accord, de s'offrir une baignade en pleine mer, brèche clandestine dans le cours des choses. De cette baignade, à laquelle seule la commandante ne participe pas, naît un vertige qui contamine la suite du voyage.
Le bateau n'est-il pas en train de prendre son indépendance ? Ultramarins sacre l'irruption du mystère dans la routine et l'ivresse de la dérive.
Véritable poème épique et roman saga d'inspiration mythologique, situé dans une époque indéterminée, L'Homme-nuit oppose le monde de la nuit originelle antédiluvienne à celui des Luministes qui, au travers du règne d'un empereur tyran, Oskur, veulent en finir avec les racines du monde ancien.
C'est une immersion que ce texte propose : celle du monde incroyable des commerçants d'une halle qui grouille de vie ! C'est drôle, mordant, un brin cynique et désespéré, à l'image de notre modernité.
Pendant une journée, on suit le narrateur, un vendeur de saucisson talentueux, entouré de la faune des petits commerçants de la halle : barmen, poissonnier, vendeur de chaussettes, libraire, tous aux prises avec un même destin insensé, le boulot-dodo.
Tout bascule dans cette fourmilière quand la galerie d'art de Fouad doit fermer pour laisser place à une grande chaîne d'alimentation bio et vegan. La panique s'empare de la halle !
Elle devient le lieu symptomatique d'une société malade et pervertie, soumise à l'unique exigence du marché, un monde absurde qui néglige autrui.
Fille unique d'un couple de retraités épanouis, exerçant la profession d'audiodescriptrice, Chloé travaille sur des successions de séries télé où s'agitent des personnages de sa génération, mieux définis qu'elle.
Lorsque sa thérapeute lui assure qu'elle souffre sans le savoir d'un lourd secret, que ses parents lui cachent quelque chose, un espoir paradoxal la galvanise. Bercée par l'euphorie que suscite cet accès de complotisme intime, elle passe son passé au crible de ses soupçons tout neufs
« S'il est difficile de vivre, il est bien plus malaisé d'expliquer sa vie. » Elle a fait de son existence une digue pour retenir le passé. Jusqu'à la rupture. Elle est née au pays Basque et a vieilli à Montréal. Un soir de mai 2018, le hasard la ramène brutalement en arrière. Sans savoir encore jusqu'où les mots la mèneront, elle écrit à l'homme de sa vie pour tenter de s'expliquer et qu'il puisse comprendre. Il y a des choix qui changent des vies. Certains, plus définitivement que d'autres. Elle n'a que deux certitudes : elle s'appelle Oyana et l'ETA n'existe plus.
Annio, une jeune femme atteinte d'une légère déficience mentale, et Argyris, un jeune homme épileptique sont voués à vivoter dans une petite ville de province où le regard des autres fait d'eux des individus « qui ne comptent pas ». Pourtant, ils trouvent à dépasser cette relégation dans laquelle on les a enfermés et à perpétuer leur marginalité en échappant aux canons utilitaristes de la société.
Les Oubliés ? Deux « vies minuscules » qui sont les figures d'une humanité inexplorée que la normalité se refuse à voir.
Thanassis Hatzopoulos est reconnu comme un des poètes contemporains les plus importants de son pays. Ses recueils ont été traduits dans une dizaine de langues. Avec Les Oubliés, Thanassis Hatzopoulos publie en 2014 son premier livre en prose, dont l'originalité a été unanimement saluée par la critique. Il est aussi traducteur en grec de Chateaubriand, Claudel, Pierre-Jean Jouve, René Char, Cioran, Michel Tournier, André du Bouchet, Yves Bonnefoy et chevalier dans l'ordre des Arts et des Lettres.
Elles sont jeunes ou âgées, citadines ou paysannes, aperçues ou remémorées. Chacune d'elles, pour l'homme qui les raconte ici, est une contrée familière parfois, étrangère toujours, qu'il contemple avec une légère distance (il ne les touche que du regard) et en même temps une profonde empathie. Tantôt séduit par leur beauté, tantôt ému par leurs malheurs. Dans ce livre Mihàlis Ganas plonge tout entier dans la mer d'un pays secret, dont les femmes tissent les frontières avec les fils très fins de l'amour, le pays qu'invisibles elles hantent, dirigent ou détruisent : femmes dans les cafés, dans la rue, devant un ordinateur, dans la mer trempée de la mémoire, au téléphone, femmes toujours, dans la solitude et l'amour, la détresse et la joie.
Même une fois reconnue, Colette (1873-1954) ne dédaigne pas travailler pour la publicité, créer sa ligne de cosmétiques - et s'intéresser au cinéma. Animée d'une grande curiosité intellectuelle et artistique, et dotée dans ce domaine d'une clairvoyance fascinante aujourd'hui encore, c'est naturellement qu'elle s'est tournée vers ce nouveau médium.
Les contacts de l'écrivaine avec l'univers du 7e art restent peu connus. Pourtant, dès les années 1910, elle est parmi les premiers et rares intellectuels qui cherchent à comprendre le phénomène historique, culturel et artistique qu'il est destiné à devenir. Elle fait partie des premiers écrivains à faire entrer le cinéma dans son univers romanesque, mais aussi à avoir une véritable activité de scénariste et de dialoguiste.
Constantin perçoit tout avec une acuité exacerbée. Il est inadapté. Despotique et implacable, son père ne vénère que la force virile, la réussite, les conquêtes conformes. Constantin est à ses yeux un raté qu'il convient de normaliser. Autour de ce tandem ennemi gravitent la mère, bienveillante mais terrifiée, Ambre, la fille aînée, brillante donc épargnée, et Mano, la cadette, rongée par le mépris paternel. Dans une prose cadencée, fiévreuse, au fil d'un monologue haletant qui épouse au plus près les perceptions de l'enfant, Bénédicte Heim raconte un carnage intime. Bénédicte Heim est née en 1970 à Strasbourg. Elle est professeur de français dans un collège de banlieue parisienne. Elle vit à Paris (75012). Elle est l'auteure d'une quinzaine de romans qui se ditinguent par leur dispositif et l'inventivité de la langue.
"Je montrerai tout. Mon coeur, mes émotions. Vert - rouge - jaune - bleu - violet. Haine -amour - rire - peur - tendresse". Niki hait l'arête, la ligne droite, la symétrie. A l'inverse, l'ondulation, la courbe, le rond ont le pouvoir de déliter la moindre de ses tensions. Délayer les amertumes, délier les pliures : un langage architectural qui parlerait la langue des berceuses. Aussi vit-elle sa visite au parc Güell comme une véritable épiphanie.
Tout ici la transporte, des vagues pierrées à leur miroitement singulier. Trencadis est le mot qu'elle retient : une mosaïque d'éclats de céramique et de verre. De la vieille vaisselle cassée recyclée pour faire simple. Si je comprends bien, se dit-elle, le trencadis est un cheminement bref de la dislocation vers la reconstruction. Concasser l'unique pour épanouir le composite. Broyer le figé pour enfanter le mouvement.
Briser le quotidien pour inventer le féérique. Elle rit : ce devrait être presque un art de vie, non ? "J'aime l'imaginaire comme un moine peut aimer Dieu".
Heureux soit ton nom est le livre qui a vraiment fait connaître Sotiris Dimitriou en Grèce.
Úrsula López, traductrice quadragénaire et solitaire, vit dans le centre ancien de Montevideo. Un soir, un appel téléphonique d'un certain Germán lui réclame une rançon pour libérer son mari... or elle n'est pas mariée.
Découvrant son homonymie avec la femme du riche homme d'affaires enlevé, Úrsula réclame une rançon plus importante à l'autre Úrsula qui surenchérit à son tour et lui demande de... la débarrasser définitivement de son mari. Dès lors, cette femme tranquille mais insatisfaite de sa vie, affamée depuis l'enfance par des régimes inopérants, se met à tirer les ficelles, prenant un plaisir machiavélique à manipuler le kidnappeur incompétent comme l'autre Úrsula. Ce qui lui permet de sortir enfin de sa coquille, de gagner en autonomie et en liberté au fil des événements.
Ordure relate le quotidien de Sloper, un agent d'entretien pour le compte d'un grand immeuble de bureaux au coeur d'une ville américaine anonyme. Sloper passe d'étage en étage en poussant son chariot pour collecter le recyclage, aspirer, nettoyer, vider les poubelles...et garder pour lui des restes de repas en tout genre... Quand il a fini, Sloper rentre chez sa mère, où il vit seul à la cave. Elle loue l'étage à des jeunes enclins aux débordements.
La routine de Sloper est interrompue un soir lorsque, constatant que le vide-ordures de l'immeuble est obstrué, il descend au sous-sol et découvre le corps nu d'une employée, jeté dans la benne tel un vulgaire déchet après utilisation. Contre toute attente, Sloper, y voyant sans doute un moyen de remédier à son extrême solitude, embarque le corps...
Un témoignage littéraire sur l'attentat du Bataclan en novembre 2015. L'écrivain, blessé pendant les événements, évoque l'absurdité, le bouleversement, la violence et l'émotion provoqués par les assassinats terroristes.
Arelis Uribe met en lumière des personnages féminins, enfants ou adultes, des femmes ordinaires, écolières, étudiantes ou travailleuses, dont on parle rarement et qui sont issues des classes moyennes ou pauvres des quartiers de Santiago ou de la périphérie. Ses nouvelles parlent des quiltras, des femmes déclassées, de la discrimination dont elles sont victimes sur le plan économique et en raison de la couleur de leur peau, des femmes jamais représentés en littérature.
Les cuicos (blancs des classes aisées) connaissent parfaitement leurs origines, contrairement aux quiltras. En mapudungun (langue mapuche parlée par les indiens du Chili), quiltro signifie chien. Comme au Chili les indigènes sont méprisés, le terme signifie aujourd'hui chien sans race, sans classe, et tout ce qui est mélangé.
Une station de ski miniature dans les alpes des Grisons suisses.
Paul et Georg attendent les skieurs en ce début de saison poussive et tuent le temps en jouant aux cartes, pelletant le peu de neige fraîchement tombée. Cette neige qui pourrait être la dernière, car demain est incertain. Les journées s'égrènent, monotones, rythmées par le ronronnement du téléski tandis que sourd, dans les récits et discours de ces «Vladimir et Estragon en bonnet de laine», une inquiétude métaphysique face à un monde qui n'est plus le leur.
Arno Camenisch est né en 1978 à Tavanasa, dans les Grisons. Il écrit de la poésie, de la prose, principalement en allemand, parfois dans sa langue maternelle,le romanche (sursilvan). Il vit à Bienne. Il est l'auteur de Sez Ner, Derrière la gare, Ustrinkata, soit le cycle dit des Grisons, tous publiés par Quidam en 2020. La Dernière Neige est inédit en français.
P.r.o.t.o.c.o.l.est un roman politique dont l'enjeu est de proposer un questionnement sur l'époque tumultueuse que nous vivons, marquée par les conflits sociaux, la violence de fond, les crises répétées en tout genre. Il tente de dessiner le portrait d'une société acculée, dont tout le monde ou presque s'accorde à dire qu'elle va droit dans le mur, mais dont, pour autant, personne ne semble à même d'infléchir la course catastrophique.
Le roman se déroule dans une ville imaginaire et en trois temps : une année et demi dans la vie des habitants, juste avant un événement violent ; puis cet événement décrit in absentia,en suivant, au fil d'images de surveillance, la trajectoire du terroriste présumé ; enfin, un temps rétrospectif par le biais d'une voix collective des années après l'événement.
« Pourquoi ce chemin plutôt qu'un autre ? Où mène-t-il pour nous solliciter si fort ? ... » (René Char, De moment en moment).
Des histoires de doutes et de choix. Des basculements de l'existence où des êtres, tous âges confondus, se retrouvent face à un dilemme : choisir la voie de la raison ou celle de l'émotion. Quel point commun entre le choix engagé, amoureux, soucieux, vital, enragé, familial, intéressé, ou aquatique ? La vie sans aucun doute. Celle que l'on choisit de vivre malgré tout ou celle que l'on mène malgré nous, encombrés parfois de diverses chaînes.
Les textes sont courts à l'image des basculements de nos vies qui nous font prendre ce chemin plutôt qu'un autre.
Pourquoi les hommes fuient capture, à traits précis et au plus près des gestes et mouvements, la trajectoire d'une jeune femme forte, indépendante, émouvante. Jane est une jeune guerrière (21 ans) hyperconnectée qui défriche son propre chemin : elle a perdu sa mère et ne sait pas qui est son père, mais audacieuse, elle fonce.
Son univers commence insensiblement à basculer lorsqu'elle se lance à la recherche de celui-ci. Sa quête, qui questionne la paternité et la lâcheté masculine, mais aussi les conséquences de la célébrité (et de l'échec), interroge également les rapports humains dans un monde de plus en plus connecté, violent, hostile à une jeunesse prise entre présent perpétuel, hédonisme et appréhension du chaos.
A la veille de son départ au combat, Heller, lieutenant de l'armée prussienne, peintre dans le civil, se confronte, dans une longue lettre testamentaire, à un autre front, intérieur et non moins dévastateur, celui d'un amour impossible avec Else, une jeune Française rencontrée dans le Paris de l'avant-guerre. "Cendors, ici encore, déroute et enchante avec ce court roman dense et fiévreusement poétique qu'il dédie à la mémoire d'Alain-Fournier".
Véronique Cassarin-Grand, L'Obs "Cette vibrante mélopée attribue à la poésie un rôle salutaire. "La poésie, c'est désimaginer le monde tel qu'on nous le vend. C'est découvrir qu'il n'est rien et que s'en éveiller est tout". Frédérique Roussel, Libération
Divisé en six parties, le roman est fait de deux récits parallèles, sur environ une année, l'un de Virgile, sculpteur réputé installé à C., village de Haute-Provence, et l'autre de Laura, traductrice littéraire vivant provisoirement à Portland (Oregon), puis à Tokyo.
Virgile a une cinquantaine d'années, Laura à peine trente. Tous deux s'expriment à la première personne.
Ils ne se connaissent pas, mais Laura est née dans le village où Virgile s'est installé. Virgile est originaire de Salles-sur Verdon, noyé pour la mise en eau du lac de Sainte-Croix dans les années 1970. Il en est parti peu avant que le village soit abandonné, laissant son amoureuse de l'époque, Lucienne, sans nouvelles par la suite. Laura ne sait pas qui est son père biologique, et ne le découvre qu'à la fin du roman.