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anna dubosc
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A la fin d'une phrase, elle a déjà oublié le début, elle ne sait plus ce qu'elle raconte : « Oh zut, tout ce que je veux parler a disparu. C'est terrible, tu sais, je ne peux plus compter sur moi. Je ne me rappelle plus ce que c'est ma vie. C'est début d'une terrible époque. » Parfois, au contraire, elle rit d'oublier, de se perdre. «Tu sais, c'est formidable, tout est nouveau !» Un récit d'amour sans filtre, sur la vieillesse et la démence de la poétesse Koumiko Muraoka, et sur la course folle de sa fille pour aller plus vite que l'oubli et sauver sa mémoire.
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Pendant des mois, je ne me relis pas, j'essaie juste d'avancer, de tenir. Quand je commence à accumuler un peu de matière, je me mets à flipper de perdre ces notes sans me décider à les transférer dans l'ordinateur. Ce serait comme me rendre à la mort de Koumiko ou la tuer pour de bon, alors qu'elle est encore un peu présente dans la matérialité des carnets, de mon écriture à la main et, bizarrement aussi, dans le risque de perdre ces notes. Il faut pouvoir les perdre, c'est pour ça qu'elles existent.
Dans ce récit, Anna Dubosc revient sur la mort de sa mère pour donner corps à sa disparition. Comme dans ses textes précédents, il en va de l'écriture face à l'existence en tant qu'expérience organique, tentative d'amplification du temps et de l'espace. -
La fille derrière le comptoir
Anna Dubosc
- Rue Des Promenades
- La Grande Semeuse
- 10 Mai 2012
- 9782918804376
Qui est-elle, Sofia, la fille derrière le comptoir ? Avec Chloé et David, elle travaille « Chez Ben », snack de quartier. Et puis elle a un mari, elle voudrait un enfant. Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là, simple et tranquille. Cet emprunt à Paul Verlaine incarcéré dit bien ce que ressent le coeur à lire La Fille derrière le comptoir. Anna Dubosc nous emmène dans ce monde-là, qui est aussi celui des frères Dardenne, où la simplicité dit la complexité de la condition humaine.
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Cléa a rencontré Oscar une nuit en sortant d'une fête. Quelques années plus tard, ses sentiments pour lui s'émoussent et les tourments surgissent. Un jour, sur son lieu de travail, elle fait la connaissance de Julien. Commence une histoire torturante qui la ravage, sans pour autant détruire ce qui la relie à Oscar. Puis vient François. Et toujours Oscar. Exaltée, brisée, angoissée, Cléa est malmenée par son désir.
Dans ce cinquième texte, Anna Dubosc écrit le désir d'un point de vue féminin, sa nature équivoque et son échafaudage mental. Roman brusque et nerveux, Nuit synthétique est la poursuite obsédante de ce qui se dérobe.
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Spéracurel est un recueil d'instants d'une vie :
Des ballades dans Paris, à travers l'enfance, les découvertes, l'apprentissage de la mort, les relations familiales, amicales, amoureuses.
Des scènes où l'ordinaire bascule dans l'insolite, l'instant défie le temps, le commun confine au spéracurel.
« J'ai trouvé un appartement à Bonne Nouvelle.
Je n'ai rien écrit pendant des mois.
J'étais désespérée. Il n'y a qu'une chose qui m'apaisait. Quand j'allais faire mes courses rue du Faubourg-Saint-Denis, je sentais la foule tout autour de moi et j'étais bien, en paix. »
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Diane s'est mise à jongler avec trois oeufs, en faisant des petits pas en avant et en arrière. Puis après elle a fait sauter les crêpes en tournant sur elle-même, avant de les rattraper. On était tous à la regarder. Christian a ricané qu'elle aurait pu faire autre chose que crevarde. Elle a continué de faire sauter ses crêpes sans le calculer. Elle savait bien qu'il la charriait parce qu'il l'aimait encore. Même moi, je le savais, ça sautait aux yeux. J'ai pensé que cette fille-là, c'était du feu et qu'il valait mieux pas en tomber amoureux.
Si Arnaud n'avait pas été voir un film vendredi soir à Loctudy, il ne se serait pas fait doubler serré par un camion, et jamais il n'aurait rencontré Diane et Pierre. Ça tient à peu, des fois.
Les teintes sobres de l'écriture d'Anna Dubosc font de ce récit simple - l'histoire d'une rencontre ratée, d'une famille qui n'arrivera pas à se construire - un instant de grâce.
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Bruit dedans restitue l'expérience quasiment organique de l'écriture, l'expérience du livre en train de s'écrire, de s'auto-engendrer.
Anna Dubosc : «Au départ j'avais juste en tête de parler de ma vie présente - et par extension, de ma condition humaine -, marquée par l'irruption de la mort et des évènements tragiques, mais aussi par la persistance de la joie et de la drôlerie. C'est ce qui m'a donné l'impulsion d'écrire ce livre. Chemin faisant, il m'a semblé évident qu'il fallait écrire sur cette impulsion même, l'intégrer au récit et la faire entrer dans les scènes, non pas comme l'envers du décor, mais, au contraire, comme le décor intrinsèque à ma perception.
Ce questionnement sur ma nécessité d'écrire a fini par envahir tout le récit et par devenir le véritable sujet de ce livre.»