Quel était le quotidien d'un individu handicapé ? Était-il pris en charge par les siens ?
Rejeté ? Soigné ? Accompagné ? Appareillé ?
Aujourd'hui, les progrès de l'archéologie permettent une lecture de plus en plus précise de cette prise en charge des infirmes, des « corps différents », des estropiés, des faibles ou des malades. Et une réflexion collective sur l'accueil de la différence dans les sociétés qui nous ont précédés, qui peut nourrir les débats actuels sur la place du handicap dans nos sociétés contemporaines.
Comment les handicapés et les malades ont-ils été intégrés ou rejetés, au fil de l'histoire ? L'archéologie nous révèle beaucoup de choses à leur propos : comment ils étaient soignés, opérés ou appareillés ; comment la société les intégrait ou les éloignait. On sait par exemple que la trépanation était pratiquée dès le Néolithique, de même que l'amputation. Quant aux prothèses, elles existaient dans l'Egypte des pharaons. De quoi en apprendre beaucoup sur le vivre ensemble à travers les siècles !
Dans l'univers celtique, le monde des vivants, le monde des morts et la sphère du sacré ne sont pas hermétiquement clos par des frontières infranchissables. La multiplication récente des données archéologiques met en lumière des pratiques récurrentes et codifiées, qui transforment certains défunts, des deux sexes et de tous âges, sacrifiés ou non, en offrandes dédiées à des divinités souterraines. Grâce à l'intercession des silos, structure de stockage des grains sur lesquelles repose la survie alimentaire de ces communautés agricoles, ces cadavres en décomposition, entiers ou fragmentés, frais ou secs, offerts et parfois associés à des animaux et des objets de prestige, semblent invoquer les forces de fertilité et de fécondité de la terre nourricière.
Ces pratiques, lisibles au sein même de la sphère domestique bien avant la mise en place des sanctuaires collectifs, témoignent d'une gestion consentie et sans tabou du cadavre, des chairs et de la putréfaction, en étoffant l'inventaire complexe des rites gaulois qui ne font pas de la mort le terme de toutes les vies.»
L'archéologie du handicap est une thématique novatrice et peu abordée, corollaire discret de la paléopathologie. Pourtant cette recherche embryonnaire, en France comme dans le monde, documente un champ entier de la lecture des comportements humains face à la vulnérabilité. L'accumulation des données archéologiques et anthropologiques permet désormais de dépasser la seule recension anecdotique de cas. Si nombre de pathologies invalidantes restent peu accessibles à la lecture archéo-anthropologique (handicaps cognitifs, sensoriels...), les soins aux patients, les interventions chirurgicales et l'invention d'appareillages compensatoires ingénieux sont autant d'indices tangibles d'une prise en charge de proximité, humaine et technique que viennent compléter les études archivistiques et l'iconographie.