Alger, samedi 29 décembre 1956. L'Algérie française porte en terre l'un de ses meneurs, Amédée Froger, tué la veille en sortant son domicile. La nouvelle de l'assassinat fait grand bruit, en Algérie, mais aussi à Paris, en raison de la personnalité de la victime, haute figure locale de la défense de la cause française. Ses obsèques à Alger rassemblent des milliers de personnes. Surtout, elles sont l'occasion de violences racistes, que les contemporains nomment « ratonnades ». Elles visent les « musulmans », comme les Algériens sont appelés dans cette société-là.
S'appuyant sur des sources variées, dont des archives policières et judiciaires inédites, Sylvie Thénault enquête sur ces événements pour les inscrire dans la longue durée coloniale. Trop souvent résumés à des actions ponctuelles et paroxystiques, ou associées aux attentats de l'OAS à la toute fin de la guerre, ces violences - non pas celles des autorités et de leurs représentants mais bien celles de Français, nés là-bas - se nourrissent d'un rapport de domination, empruntant à toutes les formes d'oppressions possibles (économiques, sociales, politiques, juridiques, culturelles) et s'ancrent dans un espace urbain ségrégué.
Sylvie Thénault plonge le lecteur au coeur de la société coloniale algérienne, traversée de brutalités et de peurs, au plus près de cette foule d'anonymes, qui ont été partie prenante de la Guerre d'indépendance algérienne. C'est ainsi un autre récit de ce conflit qu'offre ce livre.
Histoire du FLN, mécanismes de la torture, rôle de la magistrature dans les circuits répressifs, vie des appelés français...
Depuis quelques années, de nombreux travaux ont permis d'approfondir la connaissance de cet épisode sombre de notre passé que fut la guerre d'Algérie. Cette guerre, ce livre entend la renommer, pour la raconter comme un moment de l'histoire de France, bien sûr, mais aussi, indissolublement, de l'histoire de l'Algérie: car la guerre d'indépendance algérienne souleva, contre la tutelle coloniale, un peuple et une armée.
Cet affrontement n'opposa pas pour autant deux "camps" monolithiques : les tensions entre militaires et politiques au sein du FLN, entre Algériens choisissant ou refusant de se rallier, les oppositions entre Français, fervents de l'Algérie française, partisans de solutions négociées ou anticolonialistes, ont émaillé la longue marche vers l'indépendance. Ni la domination militaire française, ni la présence ancienne des Français d'Algérie, ne purent l'enrayer.
Cinquante ans après, le temps est venu d'en écrire l'histoire dépassionnée.
Peut-on aujourd'hui parler de la « guerre d'Algérie » d'une façon dépassionnée ? Cinquante ans après les Accords d'Évian, les blessures sont encore vives, les débats toujours d'actualité, les clichés tenaces. L'appellation de la guerre elle-même pose question : « Révolution » ? « Libération nationale » ? « Guerre d'indépendance » ?
Du long chemin menant des « événements » à la reconnaissance de la guerre, il nous reste bien des idées reçues : « La guerre aurait pu être évitée », « Ce n'était pas une guerre, mais des opérations de maintien de l'ordre », « La bataille d'Alger est le symbole de la guerre d'Algérie », « De Gaulle a donné l'indépendance à l'Algérie », « Les intellectuels français soutenaient le FLN », « Le FLN a mis en place un état autoritaire », « La violence est une permanence de l'histoire de l'Algérie »...
Des origines du conflit à nos jours, cet ouvrage retrace les moments-clés et leur impact dans les mémoires.
De 1954 à 1962, au nom de la lutte contre la " subversion " du FLN, au nom du rattachement de l'Algérie à la France qui interdisait d'y appliquer le droit de la guerre et de considérer les nationalistes comme des combattants, la justice et son personnel prirent une part active à la guerre d'Algérie : instruction des affaires, condamnations par milliers infligées par les tribunaux correctionnels et militaires, rappel de magistrats sous les drapeaux, etc.
Les seules condamnations à mort atteignirent les 1500, dont près de 200 furent exécutées. Dans ce livre passionnant et très documenté, Sylvie Thénault montre que cette insertion de la justice dans un vaste système de répression la priva de fait de son droit de regard sur les arrestations, les gardes à vue, les détentions et les interrogatoires pratiqués par l'armée. S'appuyant sur des archives jusque-là inaccessibles de l'Armée de terre - instructions, directives, fiches de renseignements, etc.
- et du ministère de la Justice, elle met au jour une justice amputée et réformée par les législations d'exception. Une " drôle de justice ", à l'image de la " drôle de guerre ", cette guerre qui n'en était pas vraiment une.
" Le livre important de Sylvie Thénault arrive à son heure pour remettre en perspective toute [une] période, qui affleure à nouveau dans la conscience française à propos de la guerre d'Algérie [.
]. Tel qu'il se présente, ce grand travail est appelé à faire date. " Le Monde des Livres.
" Une étude minutieuse, argumentée, probe et convaincante du fonctionnement de la justice entre 1955 et 1962. Un ouvrage qui nous en dit beaucoup sur la manière dont deux Républiques ont géré la décolonisation de l'Algérie. " L'Histoire.
Pendant la guerre d'indépendance algérienne, les autorités françaises ouvrirent des camps d'internement pour les « suspects » arrêtés par la police ou par l'armée. Des dizaines de milliers d'Algériens y furent détenus. Recours ponctuel pour maintenir l'ordre public dans des circonstances extraordinaires ? Pas seulement. Ces camps n'étaient qu'une forme nouvelle de l'internement, dont elles avaient usé, depuis longtemps, pour réprimer les résistances qu'elles rencontraient en Algérie. Y compris en dehors des périodes de guerre ou d'insurrection.
Cet ouvrage ne se borne pas à dénoncer les duretés des autorités ou leurs dérives aux moments de crise. Il retrace l'histoire, tout au long de la période coloniale, de la pratique de l'internement dans sa mise en oeuvre concrète par la France, depuis l'épo-que de l'indigénat.?Pourquoi était-il utilisé ? Qui en était victime ? Quel rôle jouait-il dans la tutelle exercée sur les colonisés ?
C'est toute la logique de l'arbitraire colonial que démonte l'une de nos meilleures spécialistes dans cet ouvrage dépassionné mais clinique.
Peut-on ajourd'hui parler de la Guerre d'Algérie d'une façon dépassionnée ? Les blessures restent vives de part et d'autre de la Méditerranée. Les Harkis, les Pieds-Noirs, la commémoration des manifestations d'octobre 61, en témoignent.
De ce que l'on a pudiquement appelé les « événements » à la reconnaissance de ce qui fut une guerre, le chemin fut long et semé d'idées reçues qui perdurent aujourd'hui encore : « Ce n'était pas une guerre, mais une opération de maintien de l'ordre », « La bataille d'Alger est le symbole de la guerre d'Algérie », « De Gaulle a donné l'indépendance à l'Agérie », « Les intellectuels français soutenaient le FLN », « Le FLN a ensuite mis en place un État autoritaire », « L'islamisme puise ses racines dans la guerre d'Algérie », ...
Il semble pourtant que l'on soit prêt maintenant à regarder cette période en face, avec le recul d'un demisiècle et l'accès progressif aux archives.
Des origines du conflit à la période qui suivi la fin de la guerre, cet ouvrage analyse les moments-clés, les séquelles encore vives et leur impact sur les mémoires.
Soixante ans après les accords d'Évian paraît le premier dictionnaire consacré à la guerre d'Algérie, rédigé par les meilleurs spécialistes de la période, algériens et français.
"Soixante ans après la fin de la guerre d'Algérie, les enjeux mémoriels liés à l'histoire de ce conflit ont alimenté autant de débats que de controverses. La recherche historique n'a cessé de progresser durant cette période. Mais il manquait un ouvrage d'une ampleur suffisante pour permettre, dans un contexte resté passionnel, de traiter du sujet sous tous ses angles, en puisant dans une bibliographie désormais abondante et en se fondant sur les acquis de la recherche, avec le souci d'objectivité et d'exigence intellectuelle qui seul peut aider à faire progresser la connaissance.
Cet ouvrage, le voici. Le fruit d'un long travail qui réussit à embrasser sans tabou l'ensemble des thèmes et des données à la fois militaires, politiques, sociologiques et intellectuels liés au dernier épisode de la période coloniale. L'un des mérites de ses maîtres d'oeuvre, Sylvie Thénault, Ouanassa Siari Tengour et Tramor Quemeneur, est d'avoir su regrouper autour d'eux des historiens et chercheurs de provenances multiples, de convictions diverses et parfois opposées. Là où les mythes l'emportent encore trop souvent sur la vérité des faits, cette pluralité des approches était non seulement nécessaire mais indispensable au crédit d'une telle entreprise.
Événement éditorial, ce Dictionnaire, par son ambition et sa richesse exceptionnelles, répondra aux légitimes attentes de tous ceux qui, sur les deux rives de la Méditerranée, n'aspirent qu'à mieux comprendre l'histoire complexe de cette guerre." Jean-Luc Barré.
Une vaste fresque synthétique de la période coloniale (1830-1962) qui rend compte notamment des travaux les plus récents. Ce livre, écrit principalement par des historiens (algériens, français et d'autres nationalités), met à disposition des lecteurs du plus large public une histoire partagée et critique de cette période historique, qui tienne compte des interrogations actuelles des sociétés sur ce passé.
Alors que les guerres d'Indochine et d'Algérie s'enchaînent, créant une période de conflit continue pour la France de 1945 à 1962, l'historiographie dépasse rarement les cadres spatiaux-temporels de chaque guerre pour les considérer comme un ensemble. Il en est de même pour la colonisation, en dépit des acquis actuels de l'histoire connectée. Le pari de ce dossier est de dégager l'Indochine et le Maghreb d'approches nationales et/ou bilatérales, centrées sur leurs relations avec l'ancienne métropole. Partant d'un projet comparatif, il aboutit à des propositions, empiriquement fondées, de renouvellement de l'histoire de l'Empire français.
Avec les contributions de Christopher Goscha, Sylvie Thénault, Pierre Grosser, Jim House, Neil MacMaster, Denis Leroux, Raphaëlle Branche, Julien Mary, Martin Thomas, Emmanuel Blanchard, Andrew Barros, Hazuki Tate, Frédéric Spillemaeker.
Jeune mathématicien, militant communiste, Maurice Audin a été arrêté le 11 juin 1957 à Alger par des hommes de la 10e division parachutiste de l'armée française. La législation des pouvoirs spéciaux avait en effet permis la délégation des pouvoirs de police à l'armée. Celle-ci pouvait alors, en toute légalité, arrêter, détenir et interroger tout individu. Comme des milliers d'autres, soumis à la torture, Maurice Audin est décédé dans des circonstances qui restent inconnues et son corps n'a jamais été retrouvé.
Sa femme, Josette, s'est immédiatement engagée pour rechercher la vérité et dénoncer la disparition de son mari, l'armée prétendant qu'il s'était évadé. Son combat incessant a abouti à une déclaration du Président Emmanuel Macron, le 13 septembre 2018, reconnaissant la responsabilité de l'État français dans la disparition de Maurice Audin.
Au prisme de cette affaire, cet ouvrage poursuit l'ambition de nourrir la réflexion autour de deux questions : est-il possible de réparer l'injustice ? Comment la justice transitionnelle peut-elle y contribuer, y compris en régime démocratique ?
Cerner au plus près le vécu de la guerre d'indépendance algérienne en métropole, voici l'objet de cet ouvrage. Par des événements touchant leurs familles, leurs activités professionnelles, culturelles, militantes ou citoyennes, comment ceux qui habitaient en métropole, Français et migrants venus d'Algérie, ont-ils vécu et connu cette guerreoe Quelles ont été les manifestations du conflit sur le terrain métropolitainoe Quelles en ont été les répercussions localesoe Le rôle de l'espace métropolitain, jusque-là peu présent dans la recherche, mérite en effet d'être réévalué, sans se limiter à l'image d'une base arrière du nationalisme algérien, siège d'une intense bataille de l'écrit. Surtout, le regard, trop souvent limité à Paris et sa région, doit être déplacé vers l'ensemble du pays. Délaissant une analyse des décisions politiques parisiennes ou une démarche de synthèse à l'échelle nationale, l'ambition est de donner à voir les expériences de la guerre au quotidien, dans leur diversité. Fondées principalement sur les archives départementales, les contributions rassemblées ici dessinent une nouvelle histoire de la guerre d'indépendance algérienne, ouvrant ainsi des perspectives renouvelées à la recherche. Comprendre comment les habitants de métropole vécurent la guerre, c'est aussi saisir la place que ces événements eurent dans leurs vies, et ensuite, peut-être, dans leurs mémoires.
11 août 1957 : Mohamed Ouali Siaci est arrêté. Ce jeune Algérien, qui aspirait à l'Indépendance de son pays, militait clandestinement au sein du FLN depuis deux ans. Il était chargé de la fabrication de faux papiers, du transport d'armes et de fonds et du soutien logistique à la guérilla en pleine Bataille d'Alger.
D'abord enfermé dans divers centres d'interrogatoire de sinistre mémoire, Mohamed Ouali Siaci est torturé, il subit des humiliations, des coups, le supplice de la baignoire, la gégène, sans livrer quoi que ce soit de son réseau... . Il est détenu dans 5 camps di??érents, dispersés dans tout le pays, pendant cinq ans.
Depuis ces camps, où sont assignés des milliers de combattants du FLN, il écrit à sa soeur Aicha .
Cinquante-quatre lettres ont été précieusement conservées par elle, des lettres qui racontent ses conditions de détention, qui disent et redisent sa foi indéfectible en la justesse de sa cause : l'Indépendance de l'Algérie.