Nouvelle extraite du recueil Le vin de Paris.
« Brillant de lune et d'étoiles, le ciel était d'un bleu glacé. À l'approche de la porte Saint-Martin, quelques silhouettes de passants surgissaient dans les coulées de lune et le pas des femmes chaussées de bois résonnait longtemps dans la nuit. Comme ils se Disposaient à franchir la ligne des boulevards, les deux hommes durent s'arrêter pour laisser passer une escouade de soldats allemands à bicyclette. La carabine en bandoulière, les cyclistes casqués roulaient silencieusement en direction de l'Opéra. Les valisards entraient dans une zone dangereuse. » Paris sous l'occupation. Le marché noir bat son plein : deux hommes fendent la nuit, chargés de vivres clandestins. Une traversée mythique, adaptée à l'écran en 1956 avec Jean Gabin dans le rôle de Grandgil.
Que va faire le modeste Dutilleul, employé modèle au ministère, de sa singulière faculté de passer à travers les murs ?
D'abord indifférent à son pouvoir, le brave homme finit par en user sans ménagement, jusqu'au jour où...
Lafleur est un peintre au talent extraordinaire. Non que ses tableaux soient d'une qualité artistique hors du commun, mais ils ont la faculté de rassasier ceux qui les regardent. Comme s'ils venaient d'avaler un bon pâté en croûte ou une crème au chocolat ! Un tel don ne peut laisser longtemps indifférents journalistes et marchands d'art... Une savoureuse nouvelle fantastique qui décrit avec humour et ironie le milieu de l'art.
«Derrière la vipère apparut une fille jeune, d'un corps robuste, d'une démarche fière. Vêtue d'une robe de lin blanc arrêtée au bas du genou, elle allait pieds nus et bras nus, la taille cambrée, à grands pas. Son profil bronzé avait un relief et une beauté un peu mâles. Sur ses cheveux très noirs relevés en couronne, était posée une double torsade en argent, figurant un mince serpent dont la tête, dressée, tenait en sa mâchoire une grosse pierre ovale, d'un rouge limpide. D'après les portraits qu'on lui en avait tracés et qu'il avait crus jusqu'alors de fantaisie, Arsène reconnut la Vouivre.»
«- Edmond ! Est-ce que tu es fou ? Voilà que tu encourages ta fille... Ah ! le jour où cette petite imbécile sera enceinte...- Évidemment, dit Archambaud en s'adressant à sa fille, c'est la chose à ne pas faire. Il faut absolument éviter d'avoir des enfants. Ça coûte cher, c'est un embarras, une cause de soucis, de tracas, et pour une jeune fille, un handicap très lourd. Ta mère s'inquiète à juste titre de ta promenade au bois des Larmes. Ce n'est pas un endroit pour céder à un jeune homme. Il ne faut le faire que dans une chambre.»
«Au village de Claquebue naquit un jour une jument verte, non pas de ce vert pisseux qui accompagne la décrépitude chez les carnes de poil blanc, mais d'un joli vert de jade. En voyant apparaître la bête, Jules Haudouin n'en croyait ni ses yeux, ni les yeux de sa femme.- Ce n'est pas possible, disait-il, j'aurais trop de chance.Cultivateur et maquignon, Haudouin n'avait jamais été récompensé d'être rusé, menteur et grippe-sou...»
Un employé pauvre a le goût du vin. Mais l'époque est mauvaise, et les moyens lui manquent pour satisfaire sa passion. Un rêve traverse et hante l'une de ses nuits : de deux fontaines d'abondance le vin coule à flots. Le malheureux, poursuivi par son obsession, considère alors ses semblables sous la forme de bouteilles de vin. Il finira à l'asile d'aliénés, condamné à l'eau de Vittel. Tel est le sujet d'une des nouvelles de ce célèbre recueil qui comprend aussi L'indifférent, Traversée de Paris, La grâce, Dermuche, La fosse aux péchés, Le faux policier, La bonne peinture.
On peut, de Marcel Aymé, faire un habitué d'un quelconque café du commerce d'une petite ville de province. Et c'est vrai que l'homme s'enracine à un terroir : il sait les matins bleus des monts du Jura et le vert livide des folles herbes ensauvagées parmi les seigles. Il sait, aussi, se perdre dans ces yeux glauques des mares inattendues qu'on trouve dans les seignes franc-comtoises. Pays de landes, où errent d'inceratines eaux que les orages pourchassent, et malheur aux fermes qui sont construites en ces lieux, car le feu du ciel les détruit à coup sûr. Déjà, ce monde, qu'on croyait si sûr, et qui paraît donné de toute éternité, tremble. M. Aymé le peut retrouver en la Ville par excellence, Paris. Il y recherche des échoppes louches et des impasses qui lui procurent, de la province, ces soirs tristes et déserts qu'elle seule sait offrir.
Mais il ne suffit pas au réel de trembler et d'être transi. Voici que «trésit» soudain l'autre. À lire les brouillons, que procure l'appareil critique, on peut mesurer comment l'être certain devient, par touches infimes, incertain. Plus rien n'est sûr. Qu'une voiture, en panne d'essence, s'arrête au café du commerce, et la belle étrangère fait basculer un monde, et sa médiocrité apparente. Il y a, dans Marcel Aymé, une nostalgie d'Aristote, et Yves-Alain Favre le montre bien dans sa préface. Si l'écrivain revendique un monde «sûr», ce monde le trompe : des êtres passent à travers des murailles, et le temps même n'a plus de rigueur, car on y peut - parfois - disposer de jours sans vie et de jours avec vie. Comment vivre, alors? On se retrouve, à la fin d'un roman, à son aube, comme si aucun temps n'était passé sur les êtres ou bien, alors, s'il le faut, on se résigne à une mort qui, elle-même, n'est pas assurée. Peut-être n'a-t-on pas assez mesuré ce que Marcel Aymé avait apporté au roman, sans en avoir l'air : un narrateur qui engendre, en chacun des chapitres, un nouveau personnage placé dans un biais différent, ou bien encore une vie leurrée par les mots de lettres qui mettent le héros dans une perspective qui ruine son propre récit. Sans cesse l'auteur déjoue ce monde si apparemment assuré, et il le corrode d'un humour qui le rouille de façon mortelle. Bref, Marcel Aymé est-il - et de façon si subtile que nous ne l'avons pu déceler - notre Aristophane? C'est la question que se pose Yves-Alain Favre à la fin de sa préface.
Françoise Arnaud, petite-fille de Marcel Aymé, et Michel Barré ont choisi trois Contes du chat perché qu'ils ont adaptés pour le théâtre. Ils en offrent ainsi une version dialoguée, fidèle au texte original, qui permettra à tous de mettre en scène ces merveilleux récits qui ont déjà fait rêver plus d'une génération.
C'est eux également qui ont conçu le « Petit carnet de mise en scène ».
De 1934 à 1940, Aymé publie un roman d'atmosphère à propos d'un immeuble qui n'en a pas (Maison basse) ; une sorte de roman policier, Le Moulin de la Sourdine, dans quoi l'on chercherait vainement le moindre moulin ; une étude de moeurs paysannes, Gustalin ; et une évocation de la vie bourgeoise (Le Boeuf clandestin), dans laquelle une jeune femme surprend son végétarien de père en train de dévorer un «biftèque». Deux recueils de nouvelles, Le Nain et Derrière chez Martin, et les célébrissimes Contes du chat perché complètent le volume. Il est difficile de dire d'où vient le charme de ces livres. Parfois le monde réel laisse perplexe - d'abord trop pauvre pour convoler, César obtiendra la main de sa Roseline après s'être enrichi en exploitant une maison close -, alors que le merveilleux semble tout naturel. Un cambrioleur mondain s'échappe-t-il des pages d'un roman policier ? on n'en est pas autrement étonné. C'est que sous l'anecdote il est toujours question de l'homme, de son désir de sortir de sa condition et de son incapacité à infléchir le cours du destin : Machelier, qui se prend pour le Christ, se noiera en tentant de marcher sur les eaux. Alors d'où vient le charme ? peut-être de l'extrême finesse de la cloison qui sépare les deux mondes, le réel et l'imaginaire, et de cette faculté qu'ont les créatures de Marcel Aymé d'être des passe-muraille.
Dans la vitrine du marchand de merveilles, un bric-à-brac somptueux éblouit les écoliers:le porte-savon de Marat voisine avec le stylographe du traité de Campo-Formio, le moulin à café de la Du Barry avec les charentaises de Berthe au grand pied. Au milieu de cet assemblage hétéroclite, les bottes de sept lieues... Qui en deviendra l'heureux propriétaire? Antoine, l'enfant pauvre, n'ose même pas rêver à semblable bonheur...
Le procureur Maillard rentre chez lui tout content d'avoir obtenu la tête d'un accusé. Sa femme, ses amis, Roberte sa maîtresse, épouse du procureur Bertolier, se réjouissent de son succès.
Celui-ci d'ailleurs s'écrie : « Dites donc, Maillard, c'est votre troisième tête.
Pensez-y bien, mon cher. Votre troisième tête. A trente-sept ans, c'est joli. » Mais, coup de théâtre : le condamné à mort s'est échappé et surgit au milieu de la charmante réunion. De plus, il reconnaît en Roberte la femme avec laquelle il a passé la nuit du crime pour lequel on l'a jugé. Roberte ne peut nier...
Humour et truculence du ton, réalisme incisif des analyses sont les caractéristiques les plus évidentes de cette célèbre comédie satirique qui pourfend la justice et ses servants.
La Tête des autres, pièce en quatre actes, a été présentée pour la première fois à Paris, au Théâtre de l'Atelier, le 15 février 1952.
Le loup :
Leurs parents partis, Delphine et Marinette ouvrent la porte de la maison au loup. Le loup doit gagner la confiance des fillettes et réparer sa mauvaise réputation.
L'éléphant :
Delphine et Marinette décident de jouer à l'Arche de Noé. Tous les animaux sont réunis, mais il manque un éléphant. La poule accepte d'incarner ce rôle, et elle le fait si bien qu'elle devient un véritable éléphant !
Michel Galabru, Roger Carel et Perrette Pradier font vivre avec talent ces contes drôles et surprenants, où l'imaginaire prend souvent le pas sur le réel...
L'écoute en classe de ce CD est autorisée par l'éditeur.
Ce volume rassemble les romans et recueils de nouvelles parus entre 1940 et 1967 S'y ajoutent les nouvelles non recueillies du vivant de l'auteur, son dernier roman, inachevé, Denise, ainsi qu'un important choix d'articles.
De 1940 à 1944, Marcel Aymé continue à écrire et à publier avec la liberté de ton et d'esprit qu'on lui connaît. Dans des récits toujours centrés sur ses thèmes favoris, l'actualité apparaît par quelques brèches : le marché noir n'est pas épargné («Traversée de Paris») ; la situation des Juifs, évoquée à demi-mot («En attendant»). À la Libération, le ton change ; l'épuration, bien sûr, est une cible de choix, mais il y a plus : la conscience du mal se teinte d'amertume, et l'univers du romancier en devient plus cruel. Le Chemin des écoliers, Uranus ou « L'lndifférent» en témoignent.
Dans les années 1950, Marcel Aymé ne se montre pas aveugle à la profonde évolution que connaît alors le genre romanesque. Michel Butor publie en 1955 «Le roman comme recherche» ; Robbe-Grillet fait paraître en 1956 Une voie pour le roman futur. Aymé lit, écoute, observe. Il donne en 1960 Les Tiroirs de l'inconnu. Le récit y est brisé, désarticulé ; les scènes se succèdent de manière chaotique. Mais une chose ne change pas, ne changera jamais : le regard, celui d'un entomologiste qui conserverait, derrière l'ironie mordante, un rien de tendresse pour les insectes affolés qui s'agitent sous son microscope.
« Comme le loup protestait de ses bonnes intentions, elle lui jeta par le nez :
- Et l'agneau, alors ?... Oui, l'agneau que vous avez mangé ?
Le loup n'en fut pas démonté.
- L'agneau que j'ai mangé, dit-il. Lequel ?
- Comment, vous en avez donc mangé plusieurs ! s'écria Delphine. Eh bien ! C'est du joli !
- Mais naturellement que j'en ai mangé plusieurs. Je ne vois pas où est le mal... Vous en mangez bien, vous ! »
Visite trouvent l'idée du dernier chic !...Un thème toujours actuel, un sens du dialogue et du pastiche particulièrement savoureux. Tout l'art du grand Marcel Aymé.
Delphine et Marinette jouent sagement dans la cuisine de la ferme. Mais une bêtise est si vite arrivée... Vont-elles se faire envoyer chez la méchante tante Mélina à la barbe qui pique ? Les fillettes ont heureusement de bons amis : le cochon qui enfile une fausse barbe pour jouer les détectives, le chien, fidèle et courageux, l'écureuil et le sanglier, qui se mettent à l'arithmétique... Quant au canard et au chat, ils n'ont pas leur pareil pour détourner les soupçons des parents...
Dans sa trente-cinquième année, un nain de cirque se mit à grandir, ce qui embarrassa les savants qui avaient fixé à vingt-cinq ans l'âge limite de la croissance. Incapable d'amuser encore le public, ou d'accomplir une autre besogne dans la troupe, il renonce au cirque et disparaît dans la foule...Treize nouvelles qui ont établi la gloire de conteur de Marcel Aymé.
Aristocrate ruiné, Clérambard martyrisait sa famille, avant que saint François d'Assise ne lui apparût. Désormais, il se mêlera de la sauver, voudra porter la bonne nouvelle dans une roulotte à travers la France, décidera de marier son fils, fiancé à une héritière, à une prostituée.
Trois nouvelles de Marcel Aymé, au style inimitable, où l'humour et le fantastique se côtoient et nous plongent dans un monde à la fois étrange et familier. Un classique ! À partir de 11 ans. Nouvelle présentation.
Le Passe-muraille Que va faire le modeste Dutilleul, employé modèle au ministère, de sa singulière faculté de passer à travers les murs ? D'abord indifférent à son pouvoir, le brave homme finit par en user sans ménagement. Jusqu'au jour où...L'HuissierÀ sa mort, Maître Malicorne n'est pas accepté au Paradis à cause de ses mauvaises actions envers les pauvres. Pour lui donner une nouvelle chance d'accomplir de bonnes actions, Dieu le renvoie sur Terre... D'une voix enjouée et généreuse, Denis Podalydès nous conte ces deux nouvelles de Marcel Aymé, au style inimitable, où l'humour et le fantastique se côtoient pour nous plonger dans un monde à la fois étrange et familier. L'écoute en classe de ce CD est autorisée par l'éditeur. À partir de 9 ans.
«La cuisine était propre. Au milieu, l'Aurélie pendait à une grosse ficelle, accrochée par le cou. De grand matin, courbée sur son cuveau, elle avait entrepris de buander le linge. Au soir, elle avait eu envie de mourir, tout d'un coup, comme on a soif. L'envie l'avait prise au jardin, pendant qu'elle arrachait les poireaux pour la soupe.»
La patte du chatPour sauver ses maîtresses d'une visite chez la terrible tante Mélina, le chat Alphonse se passe la patte derrière l'oreille et attire la pluie... mais aussi la colère des parents ! Le chienEn revenant des courses, Delphine et Marinette bousculent un chien maladroit et s'aperçoivent qu'il est aveugle. Les deux petites filles se laissent attendrir par l'animal infirme et le prennent sous leur protection. Ce nouveau compagnon sera-t-il du goût des parents ? Les boîtes de peintureToutes heureuses de leurs nouvelles boîtes de peinture, Delphine et Marinette décident de faire le portrait des animaux de la ferme. Mais le résultat ne plaît pas à tous leurs amis... Le paon Subjugués par l'élégance du paon, Delphine, Marinette et leurs amis les animaux décident de se mettre au régime : désormais ils ne mangeront le matin «qu'un pépin de pomme reinette»... Quel émoi à la ferme !
Émouvantes, malicieuses, cocasses... trois nouvelles pour découvrir ou redécouvrir un auteur français au talent unique : Marcel Aymé.