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« KIKI-LA-DOUCETTE : Elle a voulu - j'étais petit - me purger avec l'huile. Je l'ai si bien griffée et mordue qu'Elle n'a pas recommencé. Elle a cru, une minute, tenir le démon sur ses genoux. Je me suis roulé en spirale, j'ai soufflé du feu, j'ai multiplié mes vingt griffes par cent, mes dents par mille, et j'ai fui, comme par magie.
TOBY-CHIEN : Je n'oserais pas. Je l'aime, tu comprends. Je l'aime assez pour lui pardonner même le supplice du bain. »
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«Très jeune... non, je ne suis plus très jeune. J'ai gardé ma taille, ma liberté de mouvements ; j'ai toujours mon vêtement de chair étroite qui m'habille sans un pli... j'ai changé tout de même. Je me connais si bien ! Mes cheveux couleur de châtaigne étoffent toujours, nombreux, pressés en boucles rondes, l'angle un peu trop aigu d'un menton qu'on s'accorde à trouver spirituel. La bouche a perdu de sa gaîté et, au-dessous de l'orbite plus voluptueuse mais aussi plus creusée, la joue s'effile, longue, moins veloutée, moins remplie : le jour frisant y indique déjà le sillon - fossette encore, ou ride déjà ? - qu'y modèle patiemment le sourire...»
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«Son mouvement libéra le mari inquiet, qui, rendu à une jalousie active et normale, recommença de penser et se leva sans précipitation pour suivre sa femme. Elle est ici pour quelqu'un, avec quelqu'un. Dans moins d'une heure, je saurai tout. Cent cagoules, violettes ou vertes, lui garantissaient qu'il ne serait ni remarqué, ni reconnu.»
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Vingt ans après la mort de ma tante, Colette de Jouvenel, unique enfant de Colette et de mon grand-père Henry de Jouvenel, l'heure m'a paru venue de publier la correspondance qu'elle échangea avec sa mère. Elle me l'avait laissée avec mission de le faire «le plus tard possible». En quelque sorte elle s'en était libérée. Il me fallut cependant une grande détermination. Les lettres ont pour moi un caractère si intime que j'en étais retenue. Colette elle-même ne s'écrie-t-elle pas à l'occasion de la vente d'une de ses lettres à Robert de Montesquiou-Fezensac : «Une lettre est un objet sacré qu'aucune vente ne doit profaner : c'est un scandale intolérable que de disperser aux quatre vents des pensées, des impressions, connues seulement de deux personnes.» Si je me suis laissé convaincre d'ordonner les quelque six cent cinquante pièces de ce puzzle, c'est pour montrer un aspect inconnu de Colette et faire revivre la «Petite Colette». Ce que je ne pouvais imaginer, c'est que tous les originaux seraient volés chez moi le jour même où le travail s'achevait... Puisse le cambrioleur se souvenir de la phrase ci-dessus et rendre son butin.
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Aristocrate déchue et vieillissante, Julie de Carneilhan vit dans un meublé, mais sa brosse à cheveux porte toujours son blason et l'odeur de la meute est accrochée à ses vêtements rapés. Sa faiblesse est d'aimer toujours son second mari, Herbert, remarié avec une femme riche. Une crise cardiaque terrasse Herbert. Il appelle Julie, elle accourt. Quand elle comprend qu'il prépare encore une fois une manoeuvre sordide, elle s'en retourne, cavalière toujours fière, vers sa terre natale.
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«C'est très simple, je voudrais retrouver le moment où soudain Marguerite s'est arrêtée de me parler et que tout s'est suspendu. Nous étions assises l'une en face de l'autre, Marguerite Duras et moi, un après-midi d'automne, chez elle, rue Saint-Benoît numéro 5, je portais un gilet en grosse laine rouge et blanc et un petit foulard de soie léopard tacheté noir et blanc. À un moment, et c'est celui-là précisément que je voudrais retrouver, elle m'a fixée, légèrement absente, la beauté de son visage, ses yeux bleus et purs, son air unique et souverain de Marguerite D. " Tu vois, j'étais exactement comme toi. Le même foulard, les mêmes couleurs, pareille." Entre nous, sur la table, des feuilles de papier, un magnéto, des stylos, et le livre ouvert : Emily L. J'étais venue pour qu'elle me parle d'elle.»
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L'idéologie raciste ; genese et langage actuel
Colette Guillaumin
- Folio
- Folio Essais
- 20 Novembre 2002
- 9782070422302
Il n'est point ici question d'une condamnation morale convenue, mais d'une oeuvre de sociologie. L'essentiel, en effet, n'est pas l'objet de la croyance raciste - l'inégalité des êtres ou les particularités génétiques et morales -, mais la croyance elle-même, la volonté de distinguer son identité propre de celle d'autres groupes en fonction de signes distinctifs, individuels et collectifs. Le grand basculement s'opère au XVIII? siècle : à une Nature ordonnée par Dieu selon une hiérarchie où chacun, depuis Aristote, trouve sa place dans une grande harmonie sociale, voire une division du travail, succède un univers désenchanté, mécaniste, où les principes de la biologie régissent désormais les êtres, donc leurs capacités supposées, leur subordination et leur exclusion possible. Dès lors, la race n'apparaît pas comme un signe de nature biologique repérable dans les faits, mais plutôt comme une forme biologique d'exclusion sociale, utilisée comme signe, à seule fin de distinguer, discriminer, mettre à part.Les travaux des biologistes et généticiens sont salutaires, qui disent l'impossibilité de travailler avec une notion aussi indéfinissable que celle de race ; il n'empêche. La race, dans le langage ordinaire, est une modalité de distinction. Peu importe qu'elle ne corresponde à aucun outil classificatoire réel ; l'essentiel est que le terme permette l'acte : rejeter.À l'heure où les idéologies d'exclusion reprennent force, relire cette étude pionnière, qui a inspiré depuis toutes les grandes recherches sur le sujet, est un moment d'intelligence critique.
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«La bizarre comédie que fut le jour de mon mariage ! Trois semaines de fiançailles, la présence fréquente de ce Renaud que j'aime à l'affolement, ses yeux gênants encore, ses lèvres toujours en quête d'un bout de moi me firent pour ce jeudi-là une mine aïgue de chatte brûlante. Je ne compris rien à sa réserve, à son abstention, dans ce temps-là ! J'aurais été toute à lui, dès qu'il l'eût voulu : il le sentait bien.»
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«C'est le roman d'un jour. Le roman d'un siècle, mesuré à un jour. Qui veut s'approcher des mariages, des fêtes, des naissances, des ruptures, des glissements politiques, des guerres, des langues oubliées, de la musique dans les maisons, des malentendus, des illusions, des taches de soleil, du battement des secondes, des scènes sans importance, d'un baiser dans l'après-midi, d'un corps qui tombe.Il veut caresser les échos et les répétitions d'un geste ou d'un prénom dans des familles qui ne se connaissent pas. C'est un roman qui nomme les carrefours, les angles, les croisements, les couloirs, les grilles d'immeubles, les escaliers, les portes cochères, les minuscules canaux, tout ce qui trace le coeur d'une ville.C'est un roman qui a six ans au début de la phrase et quatre-vingt-deux au bout de la ligne. Le ciel est rose, il fera chaud demain, les étourneaux se faufilent dans les ficus de l'Avenue, les hommes sont assis au fond des cafés, ils n'ont pas bougé depuis cent ans. C'est l'Avenue de France, à Tunis, en 1885, mais c'est aussi Paris, Place de la Nation, en 2001.»
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«Ce sont des jours que je voudrais inviter aujourd'hui dans ce roman. Ils sont restés accrochés dans les branches, parmi les autres. Je sais qu'à chaque fois que quelqu'un naît, à la seconde même, tous les jours qu'il vivra viennent se présenter à lui. Ils guettent sa respiration, ils l'honorent, lui souhaitent la bienvenue. Ils restent un moment à voleter dans la chambre, et fouaf, ils disparaissent, dans un bruissement de papillons. Et très lentement, heure par heure, ils reviennent, l'un après l'autre, comme s'ils étaient des étrangers, comme s'ils étaient tout neufs. Je voudrais à mon tour les honorer, entrez, entrez, il y a encore de la place, je vous reconnais. Ces jours portent en eux la même interrogation, le même scénario inexpliqué. Quelque chose d'un arrachement, d'une absence mais aussi d'une vraie joie d'exister. Et si je les reconnais si vite, c'est qu'ils me poursuivent, ne me laissent jamais en paix, ils se cachent dans ma voix et dans mes nuits. Leur agencement ne relève que du hasard, du jeu, de l'aléatoire, du plaisir.»Colette Fellous.
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Douchka est une chienne entrée à l'âge de cinq semaines dans l'existence de Colette Audry. Mais qu'est-ce qu'un chien ? Qu'est-ce que l'intimité d'un être muet par nature, qui extorque l'amour, qu'on imagine sans le comprendre et avec lequel, bon gré mal gré, il faut bien «partager le monde» ? À travers cette aventure énigmatique, pleine d'épisodes douloureux, attendrissants ou comiques, la question ne cesse de se poser.Elle demeure sans réponse. Douchka meurt sans livrer son secret, forçant sa maîtresse à se livrer, elle.