«Je partage le quotidien mental de Mario Vargas Llosa depuis cinquante ans. Il m'a fallu assumer ses fantasmes et ses obsessions. En vérité, ce que je n'ai pas vécu, je l'ai rêvé. J'ai habité ses rêves, mettant mes pas dans ceux du grand homme, mimant fraternellement ses gestes, choyant sa voix. Moi, son double, son singe. Son autre moi.»Dans cet essai personnel, Albert Bensoussan interroge cette relation si particulière qui unit l'auteur à son traducteur. Il offre la meilleure synthèse de l'oeuvre du romancier hispano-péruvien, Prix Nobel de littérature et académicien français. Il nous fait redécouvrir les multiples facettes de cet auteur tout à la fois réaliste, politique, fantaisiste, épris de liberté, inlassable contempteur des dictatures latino-américaines. Mario Vargas Llosa nous apparaît comme un véritable classique moderne : un contemporain capital.
Édith Piaf, de son vrai nom Édith Giovanna Gassion (1915-1963), est bien plus qu'une chanteuse de music-hall et de variétés. Celle qui fut très tôt surnommée «la Môme Piaf» est l'incarnation même de la chanson française. «La vie en rose», l'«hymne à l'amour», «La Foule» sont aujourd'hui encore des chansons interprétées dans le monde entier. Au-delà de toute mythologie - l'enfance pauvre à Belleville, sainte Thérèse lui redonnant la vue qu'elle avait perdue, l'usage de la morphine, ses nombreuses histoires d'amours avec Cerdan, Montand, Moustaki, etc. -, Albert Bensoussan nous dévoile une femme engagée dans son temps, forte et fragile, prenant tous les risques, surmontant toutes les douleurs, dont Cocteau affirmait qu'il n'avait jamais connu d'être moins économe de son âme, «qui ne la dépensait pas, mais la prodiguait et en jetait l'or par les fenêtres».
«Je peux mettre en musique une gazette ou une lettre, mais le public, lui, admet tout au théâtre sauf l'ennui.» Né au sein d'une famille de la petite bourgeoisie campagnarde, Giuseppe Fortunino Francesco Verdi (1813-1901) est considéré comme l'un des compositeurs d'opéra italien les plus influents de son temps, et une des figures emblématiques du Risorgimento aux côtés de Cavour et de Garibaldi. De Rigoletto à La Traviata, en passant par Otello et Aïda, il composa 42 oeuvres dont 28 opéras. Ses orchestrations mettent en scène tous les sujets - réalistes, émouvants, lyriques - avec une force d'expression, une fécondité, une originalité jamais atteintes auparavant. Verdi brûla d'une merveilleuse passion, «brutale, vraie». Ce sont les mots de Georges Bizet qui ajoute : «Mais il vaut mieux être passionné de cette façon que pas du tout.»
« Au milieu de très graves conflits sentimentaux et tout accablé que je suis par l'amour, la société, la laideur, je me suis imposé pour règle la joie à tout prix et je m'y tiens. » Chantre d'un paganisme solaire, Federico García Lorca (1898-1936) est un homme comblé de tous les dons. Poète et dramaturge, mais aussi peintre, pianiste, conférencier, directeur d'une troupe de théâtre, il connaît très rapidement dans le monde hispanique un succès foudroyant. Toute de grâce et de légèreté, mais aussi d'ombre et de terreur, il n'est pas d'oeuvre plus universelle que la sienne : y luttent sans relâche « la force de l'illusion et celle de la réalité ». La très grande puissance de cet univers novateur nous est ici dévoilée à lumière crue d'une vie arrêtée en plein vol. À l'aube du 17 août 1936, Lorca est exécuté par les franquistes, en un lieu que les Maures appelaient la Source aux larmes.
« La tendre indifférence du monde » s´est abattue sur L´étranger d´Albert Camus qui apparaît ici comme témoin ou puissance tutélaire. S´il est vrai que sur ce rivage où les dieux parlent dans le soleil, le cri de ralliement des jeunes pousses étaient « Tant pis si j´en crève ! », il n´en reste pas moins que tous avaient un amour immodéré de la vie des sens et de la jouissance des heures claires. Sous divers masques et sur quelques portraits en pied, le narrateur fait tourner, au cadran de l´Algérie d´avant, l´ardente aiguille qui marque tous les temps de bonheur qui jalonnèrent sa vie.
A la fois essai et récit, ce nouvel ouvrage constitue une sorte d'ultime regard, de dernier souffle, ou de testament, sur ce que fut l'Algérie juive, arabe et française de l'auteur. Au fil de treize textes, divers aspects de cette expérience sont examinés, mêlant la chronique et l'historiette, les aperçus historiques et les éléments colorés du folklore ou des rites.
Dans la mythique d'Aldjezar, le chemin des Aqueducs garde la trace de la présence turque en Méditerranée, conjuguée à l'action coloniale. Le narrateur jette un long regard en arrière et, parcourant inlassablement l'itinéraire des collines ou le dédale des venelles, revit, en une succession d'aventures qui correspondent aux divers âges -enfant, adolescent, adulte.-, l'existence de la ville chérie et irrémédiablement perdue, victime de la guerre et du mauvais oeil.
Le Vertige des étreintes, d'Albert Bensoussan débute avec l'évocation de l'Algérie de son adolescence, l'éveil des sens partagé entre la tradition juive de sa famille, les séductions chrétiennes et la culture arabe de ses premières amours. De femme en femme, d'Algérie en Espagne puis en France ou ailleurs, d'odalisques en geishas, dans une atmosphère de fantasmes et de rêveries où l'humour le dispute à l'ironie, l'auteur reconstruit l'identité de son passé d'homme, son parcours cosmopolite, scandé par la rencontre puis l'absence jusqu'à la future disparition des êtres aimés. Le décor est, pour l'essentiel Alger, la cité matricielle, dont le récit exalte les splendeurs, épouse les soubresauts. Pour affirmer, au temps de l'arrachement et de la dépossession, la nécessaire transmission, le mirage d'un engendrement. L'adieu aux miracles anciens, fût-ce au prix du vertige, s'accompagne d'heureuses larmes en d'ultimes étreintes.
Attendue depuis longtemps, l'attribution au péruvien Mario Vargas Llosa du prix Nobel de littérature a été ressentie comme un événement majeur dans toute l'Amérique latine. Son traducteur en français, Albert Bensoussan, se risque au périlleux exercice de présenter ce grand auteur contemporain au travers de ses oeuvres mais aussi en se plaçant sous le signe de l'amitié et de la complicité. Une approche qui nous permet également de mieux comprendre pourquoi Vargas Llosa s'est engagé pour défendre avec force les valeurs de la liberté et de la démocratie. Son oeuvre s'impose à nous comme l'un des plus fidèles miroirs de notre humanité souffrante, dolente, violente, aimante, exaltante.
Depuis la Renaissance, on a toujours associé traduction et trahison, traducteur et "traditeur". Cet essai disserte librement sur ce thème. Portraits et études se succèdent laissant apparaître le visage de quelques écrivains chers au "traître" : Cabrera Infantek, Manuel Puig, Vargas Llosa, Zoé Valdés, et aussi Bryce Echenique, Onetti, Donoso ou Picasso. C'est un peu à une promenade dans la Vallée des Rois que vous convie l'auteur, guide dont la plume traduisante est le fil d'Ariane.
Toute vie ne tient qu'à un fil. Le fil d'une histoire. Le tracé d'une route, nécessairement tortueuse. Une ligne brisée que le scribe tâche de remettre en droit chemin. Au départ, Alger, la ville sultane, à l'autre bout de la mer, une plage canaréenne. Entre les deux, le naufrage d'un exil et l'espoir d'une délivrance. Une recouvrance.
Cette anthologie entend offrir aux étudiants et, au-delà, à un large public, des extraits significatifs de la poésie espagnole de 1925 à nos jours.
A côté des tendances et époques clairement établies, la place a été faite à la poésie de l'exil, consécutif à la guerre civile, au réveil de l'esthétisme, à la poésie de l'expérience qui dépasse les clivages hérités de la lutte idéologique, enfin au culturalisme. On perçoit mieux dans quelle continuité s'expriment les auteurs nés après 1940, qui contribuent aujourd'hui à assurer le renouvellement du lyrisme espagnol.
La présentation de chaque poète fournit les grands lignes de son évolution et l'introduction montre sur quels critères on peut esquisser une histoire de la poésie espagnole.
Ce récit en treize séquences plonge dans l'Algérie coloniale et la cohabitation des communautés contrastées.
Un parcours qui fait intervenir un narrateur aux multiples voix et à différents âges, aux prises avec un kaléidoscope d'images éparses : ici la main perdue de la mère fait pénétrer accidentellement le petit enfant juif dans l'intimité d'une famille musulmane, là un mauvais livret scolaire pousse au désespoir un écolier trop imaginatif, là encore l'adolescent à la synagogue reçoit de plein fouet un contre ut mortifère dont il subira sa vie durant les séquelles.
Un défilé de figures hautes en couleur: la tante un peu sorcière, l'oncle photographe trop porté sur l'anisette, la voisine de palier qui découvre à la fois l'adultère et la félonie des détrousseurs de veuves, cette autre voisine incapable d'interpréter son rêve de chameau et qui rédige un testament incongru, ce chantre d'église peu habité par la grâce divine ou ce choriste d'opéra poursuivant de sa jalousie de barbon un rival qui n'a même pas de poil au menton.
Une chronique de la ville d'Alger, fantasmée autant que remémorée, s'organise au cours de déambulations dans une atmosphère à la fois souriante et truculente, sans oblitérer le drame qui se prépare : le naufrage du pays. La famille apparaît ici comme une valeur refuge : la mère aimante, le père à la bienveillante autorité, la soeur complice des jeux sur une terre qui veut croire à la fermeté des dunes et à la promesse des fleurs.
Mais pour quels fruits dérisoires : un cornet de jujubes, une écorce d'orange, une poignée de dattes ?
Placé sous l'invocation de "tous les naufrages de Sefarad" cet ouvrage se veut a la fois réflexion sur la culture juive de la Méditerranée et lieu de parole et de fable. Entre mémoire et terroir, la littérature séfarade de langue française est abordée autour de la figure privilégiée d'Albert Cohen, mais aussi dans un itinéraire qui va d'Albert Merumi à Edmond Jabès, d'Elisa Rhaïs à Myriam Ben.
Au départ est la description de la ville.
Mais laquelle ? Rennes où le narrateur a pris racine, ou Alger d'où il a fui ? Laquelle est choyée ou détestée, aimée ou rejetée ? Ce récit est un état des lieux - multiples, comme le sont ces visages qui défilent : l'épouse, maintenant en rade, entourée de roses blanches, mais aussi cette amoureuse d'antan dont le visage s'efface sur le cliché, comme le rivage abandonné ; et puis le fils exigeant, l'ami jaloux, les camarades, les comparses. La vie - la ville - est un choix, sur un coup de dé hasardeux, mais aussi un choc, à l'instar de cette boule rouge qui doit heurter les deux blanches sur le tapis du vert paradis.
Le récit se déroule comme bandelettes de momie, instance faussement pérenne. Ce parcours d'un destin en raccourci fige le regard comme sur un album. Tout est de face, mais aussi tout reste flou, en profil perdu. Comme l'ingrate cité, ou la femme immémorieuse.
Albert Bensoussan est né en 1935 à Alger, où il a passé sa jeunesse. Professeur agrégé d'espagnol au lycée Bugeaud d'Alger jusqu'en 1961. Assistant en Sorbonne en 1963, il a enseigné à l'Université de Rennes-II de 1978 à 1995. L'Algérie apparaît à plusieurs reprises dans son oeuvre, en particulier l'univers judéo-arabe qui sert de toile fond à la plupart de ses romans.
" Mon itinéraire est le suivant : né à Alger en 1935 dans une famille traditionnelle enracinée en Algérie, j'ai vécu une enfance heureuse et pieuse, où le temps se partageait harmonieusement entre un judaïsme quotidiennement vécu au sein de la famille et à la synagogue, et une adhésion à la culture française passionnément entretenue par l'école et l'université. Mes études ont été jalonnées par une agrégation d'espagnol, un doctorat d'études ibériques et un doctorat ès-Lettres. Ma carrière s'est déroulée successivement aux universités de Paris-Sorbonne et de Rennes. Parallèlement j'ai commencé à écrire et à publier : mon premier texte fut publié par le Congrès Juif Mondial à Alger en 1957 : L'humanisme dans la pensée juive médiévale. Mais mon premier texte de fiction paraît seulement en 1965, Les Bagnoulis (Mercure de France) et raconte, sous la fable, le naufrage de l'Algérie française. J'ai publié, depuis, une bonne vingtaine de fictions, dont Frimaldjezar qui a obtenu en 1976 le "Prix de l'Afrique méditerranéenne". " Albert Bensoussan est également un grand traducteur d'auteurs hispanophones et il a notamment traduit en français, chez Gallimard, l'essentiel de l'oeuvre de Mario Vargas Llosa, prix Nobel de littérature 2010.